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07 août 2011

Marelle

voilà un livre que j'ai bien envie de décourvrir : "Marelle" de Julio Cortazar.

je vous glisse un tout-petit extrait en dessous :

 

"Horacio me traite de sentimentale, me traite de matérialiste, me traite de tout parce que je ne t'amène pas ou parce que je veux t'amener, parce que j'y renonce, parce que je veux aller te voir, parce que je comprends soudain que je ne peux pas y aller, parce que je suis capable de marcher une heure sous la pluie pour aller voir Le Cuirassé Potemkine dans un quartier que je ne connais pas, et je n'y renoncerais pour rien au monde, Rocamadour, parce que le monde n'a plus d'importance si on n'a pas la force de choisir soudain une chose qui vaille la peine, si on est rangé comme un tiroir de commode, si on te met toi d'un côté, le dimanche de l'autre, l'amour maternel, le jouet neuf, la gare Montparnasse, le train, la visite qu'il faut faire. Je n'ai pas envie d'y aller, Rocamadour, et tu sais que c'est bien ainsi et tu n'es pas triste. Horacio a raison, je ne pense plus du tout à toi, parfois, et je crois que tu m'en seras reconnaissant un jour quand tu comprendras, quand tu verras que ça valait la peine que je sois comme je suis.

 

 


Julio Silva:"sybille"

 

Mais je pleure quand même, Rocamadour, et je t'écris cette lettre parce que je ne sais pas, parce que je me trompe peut-être, parce que je suis peut-être mauvaise, ou peut-être malade ou un peu idiote, pas beaucoup, un peu seulement mais c'est terrible ça, la seule idée me donne la colique, me fait rentrer la tête dans les épaules, je vais éclater si je ne me lève pas, et je t'aime tant, Rocamadour, bébé Rocamadour, petite dent, grain de riz, je t'aime tant, nez en sucre, petit arbre, petit cheval de bois..."

Cortazar - Marelle [32] , trad. Laure Guille-Bataillon - Gallimard


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