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28 octobre 2010

le fil de Babelle

lu sur le blog de Labelle (;-) blonde :

Coule dans ses veines de l'eau pas de sang pas d'envie juste de l'insipide il faudrait la réveiller coup de tonnerre coup de foudre...qui sait....

répondu :

un acide brulant qui ravage.
l'envie d'un filtre qui apaise
parce que le sang noircit
au dedans
le souvenir d'un insipide lointain
fade et rassurant
et pourtant

à vous...

27 octobre 2010

oléagineux

 

Qui pourra jamais dire avoir vu une liane s’enrouler autour d’un tronc noueux ?

La liane ?

Le tronc ?

L’oiselle tout là-haut perchée sur la branche ?

Le fruit juteux qui s’accroche encore à l’arbre ?

Chut...

 

2_2.jpg photo Aleandre Maller

 

 

 

12 octobre 2010

Chronique (1)

Je déambule au milieu des étals du marché. je sens le poids de mon petit sac en osier vert sur mon épaule. Dedans il y a les habits de ma fille les chaussures de ma fille le sachet de bonbons de ma fille. Un livre de Russell Banks. et les petites bouteilles de limonade Abbondio 25 centilitres que je viens d'acheter.

Je déambule je regarde à peine les étalages de fruits de fromages de bijoux. Les montres à cinq euros. Les foulards multicolores. Le maquillage bon marché.

Je me dépêche. J'ai peur de ne pas être revenue à temps pour accueillir ma fille.

Dimitrios m'a interpellée devant la vitrine des limonades. Un vieux professeur de mathématiques grec, à la retraite qui finit sa vie entre la France et la Grèce. Je suis de Corfou, précise-t-il, et si vous voulez venir en Grèce je vous invite volontiers. Il m' laissé son numéro d eportable. M'a demandé si mon mari était jaloux. Il pourrait être mon grand-père. Ces hommes n'ont aucun doute sur l'exigence que nous avons nous les femmes à la quarantaine. J'aimerais bien aller en Grèce avec les enfants.

Les enfants...

Je ne dois pas me perdre à force de déambuler ainsi. Je dois vite retrouver le chemin de la clinique. Arriver avec elle dans la chambre 103. Est-ce que mon mari est jaloux ? Non. Il ne l'a jamais été ne l'a jamais montré. Et aujourd'hui il n'a de mari que le titre. Nous sommes séparés. La relation est restée tendre respectueuse affectueuse. Ca surprend ça choque. Ca énerve aussi...

24 septembre 2010

jean's

elle fait défiler les pages sur l'ordinateur et soudain... une photo de lui. et une autre.

elle reste là, bouche bée, à regarder son corps d'homme assis sur un tabouret d'enfant. ses jambes moulées dans un jean serré, bottes de cowboy aux pieds, ses bras de chaque côté de son corps, levés.

son sourire.

éclatant. toujours ce large sourire qui barre son visage.

la gourmette. petite chaine en argent au poignet. gauche. sa gourmette.

elle voit ses jambes moulées dans un jean serré, le haut de ses jambes, l'entrejambes. ça lui fout un coup de poing dans le ventre. elle se souvient.

ses jambes à elle enroulées autour de son bassin à lui, leurs corps mélangés, leurs rires mélangés, leurs langues mélangées, leurs mots mélangés.

ça explose au-dedans.

ça jaillit tout partout. le sang, le pus aussi. la plaie qui putréfie au-dedans.

elle monte dans l'auto, larmes dégoulinant sur son visage. elle met la radio : leur chanson.

elle roule, cherche une place, se gare au pif, sort de l'auto et voit ce cabinet de notaires qui porte son nom à lui. l'enseigne juste au-dessus de l'auto.

hasard ? signes ? de qui ? de quoi ?

elle se pensait tellement plus forte finalement...

21 septembre 2010

pleine Lune

- il paraît que c'est la pleine Lune aujourd'hui..

- t'es sûr ?

- aujourd'hui ou demain... enfin ça approche

- c'est pour ça ton rendez-vous ?

- non, c'était pour te voir... tu me manques.

- ah tiens... eh bien je suis heureuse de te l'entendre dire.

- ça n'a pas été trop dur pour te libérer ?

- ma mère a dit qu'elle avait besoin de moi ce soir et je lui ai promis de l'aider en rentrant. faut pas que je reste trop.

- eh... t'as oublié ou quoi ?

- hein ?

- t'as pas oublié quand même ? on est le 3. 3 janvier... merde Shana...

- le 3 ? j'ai même pas fait gaffe... désolée Kevin... mais j'suis à bloc en ce moment... ben anniversaire mon amour...

- regarde... je t'ai ramené un cadeau...

- tu déconnes ou quoi ? oh, t'es un chou ! je t'adore ! j'ai rien ramené moi, je suis vraiment désolée Kevin...

- écoute, je voudrais qu'on s'installe ensemble. ça fait un an et demi qu'on se voit comme ça, dans ma bagnole un soir par ci un soir par là. je veux vivre avec toi moi...

- putain Kévin, mais tu me fais quoi là ? une déclaration ?

- je crois bien, ouais...

Shana hésite un instant puis se jette dans les bras de Kévin. il ne lui a jamais dit qu'il l'aimait, jamais fait de déclaration, il dit qu'il n'est pas un lover, qu'il n'aime pas les mots que tout le monde dit, les mots classiques, mais là, il vient de lui offrir la plus belle preuve d'amour.

vivre avec lui. elle va vivre avec lui.

bon, c'est pas gagné, va falloir convaincre les parents et c'est pas avec son salaire d'apprenti mécano qu'il va lui payer une vie de rêve mais elle s'en fout. elle l'aime, c'est son mec. son mec à elle, c'est tout ce qui l'intéresse.

et il veut vivre avec elle...

elle a juste le temps de poser ses lèvres sur sa bouche, sa langue dans sa bouche que la première détonation retentit dans la nuit. puis une seconde.

Shana et Kévin sont unis pour une dernière fois, bouches collées quand la voiture prend feu...

 

(Les corps du jeune couple découverts samedi matin dans une voiture incendiée dans la Rozedelstraat à Halen (Limbourg) porte des blessures par balle, selon les résultats de l'autopsie, a indiqué dimanche soir le parquet de Hasselt. Les deux victimes, Shana Appeltans, 18 ans, de Loksbergen (Halen) et son ami de 22 ans, Kevin Paulus, de Kortenaken, ont donc été assassinés.
 
Samedi, vers 2h15, un passant a aperçu, depuis la E314, une voiture en feu le long d'un pont, sur une route parallèle à l'autoroute. Les pompiers ont découvert dans la voiture les restes de deux personnes.
 
La fin terrible et inexpliquée d'un "couple sans histoire" : Un des corps se trouvait sur la banquette arrière de l'Opel Corsa, l'autre dans le coffre. On ignore les motifs de l'assassinat de ce jeune couple sans histoire. Les deux victimes habitaient encore chez leurs parents. 03 janvier 2010)

 

07 août 2010

bribes en conserves

- maman, je peux rapprocher mon coussin, si jamais j'ai peur ?

- pourquoi tu lis ce genre d'histoires aussi ?


- je ne suis pas ton frère, je ne peux pas t'aider

- je sais, nous ne nous connaissons pas.


- j'ai une excuse, je pars quelques jours

- moi aussi

- je ne voulais pas vous faire patienter plus


- je suis contente de te revoir par ici, on se retrouve bientôt ?

- il faut que je recommence à écrire


- est-ce que tu veux bien me donner de tes nouvelles ?

- je vais devenir infirmier-pompier, en réa pour polytraumatisés.

- ça ne sera pas trop dur ?

- je suis devenu fort.

- tu m'as manqué.


- tu n'as pas honte, indigne ?

- non, je bois une bière à notre santé !


- tu es la plus gentille des mamans

- on va partir tous les quatre.

 

- elle est belle cette photo, c'était quand ?

- mai 2009. le 30...

- c'est vrai je me souviens de cette robe noire...

 

- j'aime pas la peau des tomates

- j'aime pas la peau du poulet

- et ça vient de qui ça ?

06 août 2010

sieste

allongée dans l'herbe chaude

poires bien mûres

petit chat noir et blanc

les enfants jouent tout autour

ballon et cris joyeux

fugaces bonheurs d'août...

 

FEMMES NOIR ET BLANC

03 août 2010

courses

- dans ma tête j'ai 90 ans

- je ne suis pas une marionnette

- qu'est-ce qui m'attend demain ?

- brochettes ou merguez ?

- je ne veux pas que mon frère me voit ainsi...

- la rivière est froide mais quel bonheur !

- tu vas me manquer

- tu me manques déjà

- viens, partons loin tous les deux rien que tous les deux

- mal dormi

- mal au pied

- je sais

 

Femme

25 juillet 2010

libération

- je suis heureux avec toi. très. vraiment.

- arrête de me harceler.

- tu peux me couper les cheveux ?

- pourquoi tu t'embarques toujours dans des galères ?

- je ne fais rien comme les autres. toujours borderline...

- envie d'une cigarette.

- la littérature est aussi une drogue

- tu dis n'importe quoi, rien de comparable.

- et pourtant ça peut rendre fou aussi.

- tu veux un dessert ?

- juste un café...

Femme Sensuelle


23 juillet 2010

Eh Manu !

- coffee is ready

- j'ai mal au ventre

- j'ai été déçu par le concert d'hier soir

- pourquoi ?

- son merdique, artiste rodé, public pas enthousiaste

- j'ai rencontré une femme qui fait des massages ayurvédiques, elle m'a laissé sa carte

- j'en ai marre de bosser comme ça

- t'as bu trop de bière

- je ne voulais pas que tu fasses la vaisselle

- je ne veux que toi...

 

Femme Sensuelle

22 juillet 2010

secrets

- j'ai bien réfléchi à ce que tu m'as dit hier...

- il est trop bizarre ce film, je ne comprends pas le sens...

- est-ce que tu m'as déjà menti ?

- chut ! c'est pas le moment.

- réponds-moi...

- non.

- pourquoi ?

- je t'ai répondu. il faut que je promène mon chien.

- demain matin j'irai acheter des croissants. ça nous fera du bien de prendre le temps de déjeuner ensemble.

- c'est quoi ces hommes qui tournent autour de toi ? le premier qui te touche, je te préviens, c'est "crime passionnel" direct...

- tu n'as pas trop mal au pied ?

- demain matin j'aime mieux qu'on fasse l'amour...

- viens, j'ai sommeil...

 

Femme Noir et Blanc

21 juillet 2010

déchirure

- je vais m'en aller

- reviens s'il te plait

- je n'aime pas m'endormir avec de la musique à fond dans la maison

- je te connais au plus profond de toi

- je n'aime pas te voir fumer

- on a un bout de chemin à faire ensemble

- arrête de tout analyser, décider, poser, critiquer...

- alors, dégage, si vraiment ça ne va pas

- j'ai faim. je vais préparer des pâtes au basilic...

 

Femme Noir et Blanc

16 juillet 2010

matin

" je me suis réveillée en sursaut. sur mon dos en dessous de l'épaule gauche j'ai senti une brûlure.

comme le reste d'un baiser qui chauffait encore.

en bas de mes reins une vibration qui irradiait encore. un baiser, c'est ça.

quelle heure pouvait-il bien être ?

tu n'étais plus là. lit vide. maison calme. pas un seul bruit.

je me suis extraite de la chambre où la chaleur n'était pas encore étouffante mais où planaient des restes d'une nuit où deux corps mélangés avaient respiré. les restes de souffles entortillés.

le chien était allongé devant la porte. inerte. terrassé par la chaleur. ou trop vieux peut-être.

tu n'étais plus là. pièces vides. maison calme. pas un seul bruit.

j'ai pensé à tes yeux sombres si doux à tes mains longues si douces à ta peau lisse si douce...

le café m'attendait. la confiture et le pain aussi.

je n'ai pris le temps de rien.

la vie s'impatientait dehors, je m'y suis faufilée. en pensant à toi, pas là. à nous. à nos discussions sans fin. à nos avancées. nos sourires, nos bagarres d'enfants... "

Anne se réveilla en sursaut. cette voix de femme était encore venue la hanter cette nuit. elle ne comprenait pas pourquoi elle entendait cette voix dans ses songes, cette voix éraillée qui semblait si lointaine. et qui revenait de plus en plus souvent la visiter la nuit... et semblait s'adresser à quelqu'un. à un homme.

elle se dit qu'elle devrait peut-être écrire ce que la voix disait dans sa tête la nuit. elle se leva, prit une feuille blanche sur son bureau et se concentra sur les phrases qu'elle venait d'entendre.

laisser une trace.

parce qu'un jour peut-être, elle saurait...

14 juillet 2010

juste une photo de toi

il y avait cette photo postée contre l'ordinateur et la voix qui murmurait : écris !

ouais ben t'es malin toi mais ça ne vient pas comme ça. envie d'écrire de vraies belles choses moi.

l'instant d'avant le vent qui soufflait en bourrasques légères et rafraîchissantes dans son cou pendant qu'elle déambulait par les chemins villageois semblait lui envoyer le même message : maintenant c'est à toi, écris. moi je suis là, je reste près de toi quoi que tu fasses quoi que tu décides je te protège je t'accompagne alors écris.

elle allongeait ses jambes sous la table en plastique blanc et sentait son corps couler dans une molle sudation sous le soleil qui la réchauffait toute entière.

tout autour le calme. enfin. un silence qui n'augurait aucune organisation planifiée codifiée obligée.

d'abord j'enlève les majuscules et la ponctuation. je garde les points. point. je trouve des mots hauts en couleur.

non, j'écris une histoire glauque. du noir.

ou une histoire de bouffe. une nouvelle.

un conte pour enfants. du nouveau. fantaisie décalée.

je commence par où, je finis quoi ?

je vais où moi comme ça ?

elle fermait les yeux. les images affluaient dans sa tête sans même attendre une autorisation qu'elle ne se savait pas prête à donner.

"arrête de tricher, merdeuse"

eh oh ça va, tricheur toi-même. moi je suis encore là. pas toi.

comment il avait écrit le lecteur anonyme ? : je tiens à vous signaler qu'il m'est par contre tout à fait impossible de vous faire remonter le temps (pour une vague histoire de paradoxe temporel)

ben voilà on y était : impossible de faire marche arrière, il ne restait qu'à avancer.

et écrire.

sous peine de paradoxe temporel.

ben avec ça, elle était bien lotie...

allez courage, il allait bien venir ce best-seller qu'il attendait tant.

ben voyons...

 

13 juillet 2010

S.O.S. (fin)

Soupir.

Francine s’en doutait. Elle s’en doutait. Elle s’en doutait.

Il n’empêche que son cœur battait à tout rompre. Francine fermait les yeux. Qu’allait-on lui annoncer ? Une côte cassée ? Une épaule luxée ?

- Bénédicte Caligari est bien votre fille ?

- Oui… malheureusement.

Francine n’en revenait pas. De penser ça. De le penser vraiment.

Bénédicte et elle avaient toujours été tellement complices.

Et il avait fallu l’arrivée de ce Marco dans la vie de sa fille pour que leur relation se réduise à néant.

Et qu’elle n’ait plus envie de se comporter comme une mère avec sa fille.

Quelle connerie l’amour !

- Il va falloir faire vite. J’ai besoin de votre autorisation.

- Mon autorisation ? Mais pourquoi ?

- Pour sauver le bébé… Pour votre fille, on ne pourra malheureusement rien faire de plus, mais on peut encore sauver le bébé. Si vous acceptez de le prendre en charge ensuite…

- Mais quel bébé ?

- Celui qu’elle porte dans son ventre depuis huit mois. Et dont elle ne pourra s’occuper, je le crains. Elle a de multiples fractures aux côtes et le visage broyé. Son cœur respire à peine. On ne peut rien faire pour elle, je vous assure. Si ce n’est sauver le bébé.

12 juillet 2010

S.O.S. (4)

Marco avait appris la venue de Francine, s’était fâché et les coups avaient redoublé de violence.

Il surveillait sa « fiancée » de près et Bénédicte avait décidé de ne plus risquer sa peau pour quelques échanges téléphoniques anodins.

Anodins…

Francine encaissait tout sans réagir.

Persuadée qu’elle ne pouvait malheureusement pas grand-chose pour sa fille, elle avait vécu le même parcours, elle connaissait le fonctionnement de ces hommes-là et la détresse qui peut ravager la femme qui vit cela. Elle avait mis dix ans à se sortir de l’emprise « frappante » de son mari.

Le soir où il avait porté la main sur Marwin, elle n’avait pas supporté. Elle avait alors compris que le père de ses enfants avait dépassé les limites. Elle s’était enfuie, sa marmaille sous les bras et avait trouvé refuge chez une tante compatissante. Sa mère ne lui parlait plus…

Quand la sonnerie du téléphone retentit dans la nuit, elle sursauta si fort qu’elle en reversa son verre de lait.

C’était la seule boisson non alcoolisée qui calmait ses angoisses nocturnes.

Madame Caligari ?

Oui…

Madame Francine Caligari ?

Oui…

C’est l’hôpital de Draguignan.

10 juillet 2010

S.O.S. (3)

Et Francine avait commencé à avoir peur. Sérieusement peur.

Alors, bravant les interdits elle était partie voir sa fille. Elle l’avait trouvée tuméfiée, lèvres boursouflées, yeux gonflés et noircis.

Elle le savait.

Francine le savait depuis le début. Les histoires se reproduisent en cycles générationnels.

Ce n’était pas juste.

Bénédicte avait accepté de passer l’après-midi avec sa mère. Avait raconté qui était ce Marco.

Videur de boite de nuit depuis plusieurs années, Marco Balestra avait rencontré Bénédicte au cours d’une soirée festive organisée par les étudiantes infirmières.

Bénédicte avait accompagné ses copines dans cette boite de nuit branchée et avait certainement bu plus que de raison.

Lorsque Marco lui était tombé dessus, argumentant son attitude trop aguicheuse, Bénédicte avait ressenti la violence de ses coups de poing sur son visage au diapason de la violence des battements de son cœur qui  craquait pour l’homme fort et musclé qui la tabassait.

Francine écoutait, se retenant de pleurer. Pourquoi avait-il fallu que ça arrive à Bénédicte ? Elle avait déjà tellement donné, elle, quand elle était jeune femme et elle espérait en avoir suffisamment parlé pour éviter que le drame ne se reproduise.

Mais, obstinée, Bénédicte ne savait que lui répéter : Je l’aime, c’est l’homme de ma vie, tu sais, et puis il n’est pas toujours brutal. Juste quand il rentre fatigué et saoul. Ou qu’il est contrarié. Sinon, c’est un homme merveilleux  tellement attentionné et si amoureux aussi…

Ca, Francine n’en doutait pas, elle connaissait la chanson sur le bout des doigts.

Il lui avait sûrement dit également qu’il ne pouvait vivre sans elle, parce qu’elle était sa source d’équilibre et que grâce à elle, il allait changer et se contrôler.

Francine était repartie mortifiée ce soir-là. Mais Bénédicte l’avait convaincue de lui faire confiance, elle savait ce qu’elle faisait, elle n’était plus une enfant et elle allait faire sa vie avec Marco, quoi qu’on puisse lui dire.

Pour Francine l’attente avait pris sa place dans sa vie. Elle savait qu’un jour ou l’autre, le téléphone sonnerait. Elle croisait les doigts pour qu’il ne soit pas trop tard alors.

Depuis cinq mois, Bénédicte n’appelait plus.

04 juillet 2010

S.O.S. (2)

Là, Francine avait compris que sa fille ne lui avait pas tout dit.

- Maman, je te rappelle demain parce que c’est l’heure du bain des garçons. Je t’embrasse. Fort fort fort…

Silence à nouveau.

- Maman ?… Je t’aime.

Il avait fallu plusieurs appels pour que Francine obtienne enfin une réponse à cette question inlassablement répétée : Tu dors où ?

Bénédicte dormait chez Marco. C’était d’ailleurs Marco qui lui avait trouvé ce travail saisonnier. Pour qu’elle puisse le rejoindre.

Marco ? Mais qui était ce Marco ? Francine n’en avait jamais attendu parler au préalable.

Il avait fallu encore d’autres nombreux appels avant que Francine sache que Marco était plus vieux que Béné d’une dizaine d’années.

Mais la jeune femme de vingt ans vivait avec fierté cette différence d’âge. Dans le cœur de Francine de mauvais souvenirs avaient ressurgi et elle s’était mise à prier Dieu que rien ne recommence comme avant. Comme ce qu’elle avait vécu.

Et pourtant, elle avait un pressentiment qui grossissait dans son âme jusqu’à la faire vomir parfois. Malaise. Pressentiment.

Arrête, tu te rends malade pour rien. Ta fille va bien.

Même la tendresse de Gilles n’apaisait pas son trouble. Si cet homme était quelqu’un de bien, pourquoi sa fille faisait-elle tant de cachotteries. Elle ne savait que répéter qu’elle était follement amoureuse. Heureuse.

Amoureuse. Heureuse. Amoureuse.

Ces deux mots en boucle.

Comme pour mieux convaincre sa mère. Ou se convaincre elle.

Avec les semaines, les appels s’étaient espacés. Après tout Bénédicte était une femme à présent, elle vivait sa vie d’adulte et il était temps pour elle qu’elle s’éloigne des jupons de sa mère. Pourtant, Francine n’était pas dupe et quelque chose changeait dans le ton de sa voix. Bénédicte avait perdu son enthousiasme des premiers jours.

Et parfois, les mots sortaient difficilement comme coincés entre deux sanglots.

« Ma fille a le temps de se mettre avec un homme, de façon sérieuse, confiait Francine à Gilles quand elle n’arrivait plus à faire semblant que tout allait bien. Ce job saisonnier se termine dans un mois, même pas, et nous verrons bien où en sera leur histoire à ce moment-là… »

Mais après les deux mois écoulés, Bénédicte n’était pas redescendue les voir. Elle n’avait pas les moyens pour le moment, car finalement elle n’avait reçu que vingt euros pour son babysitting, les parents de Benjamin et Arthur ayant argumenté qu’elle avait été logée, nourrie et blanchie durant toute cette période et qu’elle avait même pu aller skier avec les enfants, à leurs frais.

La vérité c’est qu’ils étaient de bons amis de Marco et que Bénédicte n’avait pas osé broncher.

Mais du coup, elle était tributaire de ce Marco qui l’avait finalement accueillie chez lui.

Francine insistait : tu peux revenir avec nous, tu le sais, la maison est grande ouverte.

Mais Bénédicte n’avait qu’une réponse, invariablement : Marco était l’homme de sa vie, elle en était follement amoureuse.

Et puis, il y eut le silence.

Durant plus d’une semaine, Bénédicte n’avait plus donné signe de vie.

03 juillet 2010

S.O.S. (1)

Francine attendait dans la pénombre de sa chambre que le téléphone se décide à sonner. Chaque soir, c’était le même rituel : impossible de fermer l’œil de la nuit, elle attendait ce foutu appel.

Cela faisait huit mois que Bénédicte était partie de la maison. Elle avait trouvé un job saisonnier, avait-elle dit, fière de pouvoir enfin voler de ses propres ailes. Financièrement, tout du moins. Et le temps d’une saison, semblait-il.

Mais peu importe, Francine était contente de voir Bénédicte se bouger et prendre son destin en mains.

Ça, pour le prendre, elle l’avait pris.

Les premiers jours, elle appelait et rassurait sa mère avec sa voix enjouée et sa bonne humeur. Tout se passait à merveille, les gosses qu’elle gardait étaient vraiment adorables - remuants mais adorables ! - et puis, faire babysitter dans un chalet à la montagne, c’était quand même le pied ! D’accord elle ne pouvait pas skier la journée car elle devait surveiller les deux lascars qui n’étaient pas toujours de tout repos, mais elle espérait pouvoir négocier rapidement un week-end - un dimanche au moins ? - pour se faire plaisir sur les pistes.

- Il fait un temps splendide, maman, et Benjamin s’éclate sur la luge, si tu le voyais !

- Benjamin ?

- Oui, le plus petit des deux… Le grand skie déjà sur des patinettes et je dois garder l’œil ouvert car il n’attend qu’une chose : pouvoir se débrouiller seul. Ce dont il n’est absolument pas capable pour l’instant.

- Et toi ?

- Quoi moi ?

- Tu te plais là-bas ?

- Oh maman ! Je n’ai jamais été aussi heureuse.

- Mais tu dors où ?

Silence.

19 juin 2010

jambes de bois

les filles voudraient remarcher

avec leurs jambes de bois leur coeur démantibulé leurs viscères en plomb

elles écoutent des chansons tristes

pleurent en cachette

prennent des béquilles

elles courent musique dans les oreilles

cheveux au vent l'odeur des genets qui enivre

MP3 des enfants sur les oreilles

"le vide je vais le remplir

de bons ou de mauvais souvenirs

le vide je veux le remplir

avant que mon âme s'assèche et que je craque

je veux tout le silence et les promesses

le rigide et la souplesse

je veux tout l'anarchie et la sagesse

ton sourire et puis tes fesses

je veux tout toi et tous tes amis

pour tracer mes jours et mes nuits

sur les coeurs il n'y a pas de prix

je veux tout, tout de suite et ici..."

elles pensent à cette phrase de l'homme grand : il faut faire sa place au mal -mauvais ou souffrance- mais juste sa place, on ne doit pas laisser le mal tout envahir. il y a le reste aussi. la vie. celle qui existait avant ce mal, celle qui continue encore...

dans la tête des filles Balavoine répète comme dans Starmania : si on vit pas maintenant, après il sera trop tard.

alors elles marchent elles courent elles sautillent

en boitant

ou pas.

 

Femme